« La French Fab est une initiative du président de la République qui a pour but de dynamiser les entreprises », lance Louis Vogel, président du Sympav, expliquant que depuis sa prise de fonctions, près de 1 200 emplois ont été créés grâce à l'implantation d'entreprises liées au secteur aéronautique. « Avec l'installation du vaisseau amiral du groupe La Poste, c'est encore un millier d'emplois qui rejoindra la région. Et nous avons encore beaucoup de demandes, le site va continuer à se développer », ajoute-t-il, évoquant l'installation future du siège du Medef ou encore celle d'Eoz (auparavant implantée à Ozoir-la-Ferrière).
« Il s'agit de la 54e date de ce village industriel, qui a commencé en janvier et se terminera à l'AccorHotels Arena le 10 octobre », explique à sa suite Damien Marc, président de JPB Systeme et ambassadeur de la French Fab. « Nous nous engageons à respecter quelques valeurs essentielles : innover, notamment en matière d'écoresponsabilité ; moderniser nos outils de production, c'est-à-dire les digitaliser, nous mettre à exporter et surtout s'entraider », poursuit l'entrepreneur.
« Chez JPB Système, au départ, nous étions trois, nous sommes aujourd'hui une centaine et cela a pris 10 ans. Notre seul client était Safran, depuis nous travaillons avec l'ensemble des motoristes mondiaux (Pratt & Whitney à Rolls Royce, General Electric) et exportons 85 % de nos produits », détaille le jeune entrepreneur, qui fabrique des bouchons endoscopes autofreinants. « Nous sommes allés très vite, ce qui peut faire peur à certains. Le plus dur n'a pas été d'aller chercher les clients ou les financements, mais la main-d'œuvre », se remémore Damien Marc.
D'où l'importance d'organiser ces journées dédiées à la French Fab et destinées à « faire germer chez les jeunes le désir de travailler dans l'industrie ». « Certains pourront devenir ingénieurs, d'autres techniciens ou tourneurs fraiseurs. Ceux capables de piloter des lignes automatisées sont payés chez JPB Systeme le même prix qu'un jeune ingénieur, c'est notamment ce qui devrait les faire réfléchir ».
Loin d'être une « lubie », l'industrie du futur a été pour JPB Systeme un moyen de poursuivre sa croissance. « Il nous fallait arriver à faire fonctionner un maximum de machines avec un minimum de personnes. Non seulement je n'avais plus à me heurter à ce problème de recrutement, mais en plus je devenais compétitif. C'est ce qui a fait notre succès ». JPB Système a également développé plus récemment un logiciel pour piloter une usine à distance. « C'était assez novateur et je suis devenu l'un des premiers ambassadeurs de la French Fab il y a deux ans. Dans ce cadre, j'ai décidé d'ouvrir mon usine aux PME, aux grands groupes ; j'ai aidé certaines entreprises à faire le premier pas, expliqué ce qui avait bien marché et ce qui nous avait freinés ». Car ce qui peut bloquer en premier lieu l'entreprise à se convertir, c'est qu'elle ne sait par où commencer. « Cela peut lui paraître complexe et c'est pourquoi nous avons lancé Keyprod pour vendre des logiciels et des objets connectés dédiés à l'usine du futur », poursuit Damien Marc.
La première promotion du Training Center a reçu symboliquement ses blouses en présence de son parrain, Damien Marc.
La formation adaptée
C'est suite une demande formulée par Daniel Hernandez, dirigeant de Zodiac Aerospace, qu'a cheminé l'idée de créer une formation adaptée aux besoins locaux en main-d'œuvre. Le Sympav a donc mis sur pied, en collaboration avec les acteurs concernés, le Training Center, un centre de formation de quelque 10 000 m2 mutualisant les forces du Greta MTE 77, du CFA académique de Créteil et du lycée Léonard-de-Vinci de Melun. Le dirigeant de JPB Systeme, parrain de la première promotion du Training Center, s'est dit très fier d'accompagner sa première promotion. « Nous mettons sur pied une nouvelle manière d'apprendre. Les apprentis travailleront sur des machines récentes avec de vrais formateurs issus de l'industrie », se réjouit Damien Marc, qui prévoit d'envoyer ses équipes « témoigner des problèmes concrets » rencontrés en atelier. « L'idée c'est de faire quelque chose de pragmatique et ensuite de filmer la formation, de la partager sur les réseaux sociaux et d'intégrer ces jeunes sur Linked In pour qu'ils puissent très facilement trouver du travail dans deux ans. Ce sont les French Fabers de demain ».
Si la filière industrielle en général a longtemps pâti d'une image négative, Olivier Horaist, directeur industriel et achats chez Safran, a pu témoigner des bouleversements en cours liés au passage à l'industrie 4.0. « Safran est un groupe qui incarne cette industrie nouvelle. Nous avons plus de 100 usines en France et nous en ouvrons tous les ans », rappelle-t'il, qui prend l'exemple de l'annonce récente de la création d'une nouvelle usine à Lyon, qui va mêler trois industries différentes (textile, pétrochimique, et mécanique). « Lorsque nous avons lancé ce projet d'usine, nous étions en compétition avec les Etats-Unis, dont les usines coûtent 30 % moins cher qu'en France ». Le groupe a toutefois fait le choix de « raisonner en 4.0 », d'utiliser la donnée, d'économiser l'énergie et de créer une usine écoresponsable. « En faisant cela nous avons apporté de la compétitivité, l'usine d'aujourd'hui peut être écoresponsable et compétitive », assure le directeur. Le gaz utilisé par l'usine pourra être réutilisé pour alimenter un réseau de chaleur interurbain, la consommation d'électricité et d'eau seront également réduites (de l'ordre de 30 %). « C'est une forme d'économie circulaire qui nous apporte de la performance. En réfléchissant à toutes ces dimensions d'usine intelligente, digitale et écoresponsable, nous avons réussi à concevoir un projet 10 % moins cher qu'aux Etats-Unis », lance Olivier Horaist, qui précise que Safran investit un milliard d'euros par an dans ses capacités industrielles et que plus de 60 % de cet investissement se fait en France. « Ce n'est pas parce que le pays a les conditions salariales idéales, c'est parce que c'est ici que nous serons capables de maîtriser le procédé industriel en interne, pour autant que l'industrie aéronautique fasse cet effort de modernisation », ajoute-t-il, indiquant que les plus anciennes usines, telles que de celles de d'Evry-Corbeil et de Villaroche, devront elles aussi se transformer pour suivre ce mouvement.
Selon Olivier Horaist, cette industrie du futur compte des grands groupes, mais aussi des ETI et des PME qui sont des avantages exceptionnels. « Le véritable enjeu est que notre tissu industriel puisse capter cet avantage lié à l'industrie 4.0, se transformer avec ces outils et devenir compétitives », estime-t-il. « Pour tous ces jeunes, ce sont des usines digitales, des usines qui se transforment, c'est une aventure passionnante ».
Près de 2 000 offres d'emploi
La directrice territoriale Seine-et-Marne de Pôle emploi, Caroline Bacchini, est ensuite intervenue pour présenter l'état de l'offre dans le département. Avec plus de 1 900 offres d'emplois enregistrées à Pôle Emploi Seine-et-Marne sur le premier semestre 2019, l'industrie représente le 5e secteur recruteur, tandis que le volume d'offres est en hausse dans l'industrie en général. « D'autant plus que 70 % de ces offres sont des postes durables », souligne Caroline Bacchini. La dernière enquête sur les besoins en main-d'œuvre a par ailleurs montré que le 2e secteur le plus difficile en matière de recrutement était celui de l'industrie.
« Il est en 23e position des métiers les plus recherchés par les demandeurs d'emploi », déplore la directrice territoriale. C'est pourquoi l'agence a développé récemment « l'approche compétences » pour s'adapter aux mieux aux besoins des entrepreneurs. Elle travaille également sur des « évaluations des habiletés » via la « méthode de recrutement par simulation ». « Un grand nombre d'entreprises l'utilise en Seine-et-Marne pour tester les compétences au-delà du CV ou de la lettre de motivation », signale Caroline Bacchini. Par ailleurs, l'initiative nationale #versunmétier « a été déclinée en Job dating au sein de nos 16 agences avec l'objectif de lever le voile pour aller vers l'attractivité des métiers », permettant également aux entreprises de « vendre leur marque employeur ». Des rencontres avec les organismes de formations pour présenter toutes les formations disponibles dans le monde de l'industrie ont également été organisées.
Eric Laplace, président de Boge Elastmetall, une entreprise de 95 personnes réalisant 13 millions d'euros de chiffre d'affaires dont 70 % à l'export et exerçant dans le secteur de l'équipement automobile, a de son côté développé une école d'entreprise. « Nous avons dégagé des encadrants qui accueillent les entrants. Nous leur faisons suivre un parcours de formation d'entreprise à nos métiers et à notre culture »,