Quelles sont vos relations avec la chambre territoriale de Seine-et-Marne ?
Il faut rappeler que la Seine-et-Marne représente la moitié du territoire francilien. C'est aussi un territoire extrêmement riche, doté d'une variété de ressources exceptionnelles en Île-de-France. Enfin, ce département offre de nombreuses opportunités, car il dispose de grands espaces pour favoriser le développement économique. Le département présente donc de nombreux axes de développement, y compris dans les grands projets structurants à venir. Nos relations avec la chambre territoriale, qui dépend de la chambre de région, sont par définition excellentes. L'ensemble de nos projets incluent évidemment la Seine-et-Marne, à égalité avec les sept autres départements. La seule différence, à l'instar de l'Essonne, est que si la Seine-et-Marne développe des activités sur ses ressources propres, elle les garde pour elle, alors que les autres départements reversent tout à la région. Au-delà de ça, j'insiste sur le fait que c'est un territoire vaste, qui induit donc de grands projets de développement, mais qui dispose de tous les outils pour les mener à bien.
Au vu de son potentiel de développement, la Seine-et-Marne est-elle un chantier prioritaire pour la Chambre ?
La règle du jeu est de dire que dans la mesure où il existe des projets correctement préparés sur ce territoire, ces derniers ont l'avantage évidemment. Il est un peu prématuré de parler de ces projets, mais certaines opportunités et critères permettent d'être optimiste pour l'avenir. Il est donc souhaitable de mettre l'accent sur ce territoire, mais je reste prudent car je ne voudrais pas qu'on dise que cela se fait au détriment des autres. Dès lors que vous travaillez avec un territoire aussi vaste, la question de la mobilité et des infrastructures se pose. Il est donc important pour la Chambre de veiller au développement des transports. Les usagers ne devraient pas perdre de temps sur le circuit de transport prévu. Si le problème de mobilité est résolu, il n'y aura plus de débats. C'est donc dans ce domaine que nous intervenons, soit directement, soit par l'intermédiaire du Stif.
Quelles sont les actions récentes de la Chambre régionale ?
La Chambre de commerce et d'industrie Paris – Île-de-France travaille sur beaucoup de projets en cours de développement. Elle a de très bonnes équipes et de nombreuses idées intéressantes sont en gestation, mais il faut faire le tri et essayer de trouver ce qui est le plus efficace et pertinent pour les entreprises. Sur la digitalisation, par exemple, nous lançons les digiteurs – une offre globale pour la transformation digitale des entreprises. Nous avons décidé de favoriser la digitalisation des entreprises, et nous menons aussi une réflexion pour structurer et numériser notre réseau de pépinières, afin de favoriser la création de nouvelles entreprises. Nous devons améliorer les canaux de communication entre les différentes pépinières, les différents incubateurs, les espaces de coworking, etc.
La nouvelle bibliothèque d'HEC constitue un parfait exemple. Ouverte 24h/24, elle met à disposition des canaux de communication et des professeurs du monde entier, en direct. Nous faisons donc porter l'effort sur la digitalisation des entreprises existante. Si nous voulons favoriser la création de start-up, notre stratégie en matière de pépinières doit aussi être déterminante.
La création d'entreprises augmente, mais l'investissement productif semble stagner. Quelle est votre analyse sur ce point ?
Si on dispose d'un vrai projet, on peut trouver des investisseurs. Mais on rencontre aujourd'hui des entrepreneurs qui se plaignent des difficultés d'emprunt et des banques qui ne savent plus où placer leur argent. Les acteurs financiers doivent donc descendre en gamme pour proposer des possibilités de petits investissements. Le réel problème reste que les banques hésitent à financer la création d'entreprises. Le seul moyen est de mutualiser un grand nombre de projets. Nous appelons donc la nouvelle administration publique à diriger correctement l'investissement vers les PME, par le biais d'un nouveau circuit fiscal. En parallèle, il faut que les petites entreprises conçoivent l'investissement au-delà du matériel. Les grandes structures l'ont compris. Elles engagent de très lourds investissements dans les domaines dématérialisés. Il appartient aux PME-TPE de s'engager à leur tour.
Encouragez-vous les petites entreprises à utiliser des moyens alternatifs de financement, comme le crowdfunding ?
Bien que nous ne soyons pas acteurs dans ce domaine, nous observons de près le développement de ces nouveaux moyens de financement. Il y a naturellement des limites. Nous avons pu constater quelques incidents. Nous sommes intervenus sur le nouveau marché des emprunts privés (EUROPP), et bien qu'il n'y ait pas eu beaucoup de sinistres, il faut être vigilant, le cas William Saurin est révélateur. Les comptes du groupe n'étaient pas correctement tenus et certains préteurs ont perdu de l'argent dans cette affaire. Mais le marché se développe – actuellement entre 6 et 7 milliards d'euros –, sans pour autant atteindre le niveau allemand du crowdfunding, proche de 20 milliards d'euros. L'objectif est donc de développer ce marché comme les Allemands. Il faut imaginer de nouvelles structures de financement, notamment par le biais des collectivités locales, comme c'est le cas outre-Rhin.
Avec l'arrivée du gouvernement Édouard Philippe, quelles sont vos attentes en matière de réformes économiques ?
Au-delà de l'allègement des charges et de la flexibilité du droit du travail, la priorité me semble être le redéploiement judicieux des dépenses publiques. Alors que les services régaliens semblent à peu près équivalents entre la France et l'Allemagne, la différence des taux de dépenses publiques est tout de même de dix points (47 % contre 57 % en France). Après, il faut aller dans le détail pour correctement interpréter ces chiffres. Mais il est vrai que le taux de dépenses publiques reste très élevé en France. Maintenant, il est évident que cela relève de très lourds chantiers, lents à mettre en œuvre. Pour le moment, essayons de simplifier les choses pour donner de l'oxygène à notre tissu économique. Dans un tout autre domaine, j'appelle à impérativement conserver le crédit-impôt recherche, qui constitue un avantage comparatif majeur pour notre pays.
À l'international, quel encadrement proposez-vous aux entreprises sur certains marchés porteurs, mais sensibles politiquement, comme la Chine, la Russie ou l'Iran ?
L'Iran est un cas particulier, mais en règle générale, nous disposons de deux canaux dans ces pays : un bureau de la Chambre nationale, installé sur place, et une Chambre de commerce française, qui assure la représentation des entrepreneurs français.
Pour la Chine, la vraie interrogation porte sur l'évolution du modèle économique, en pleine transition actuellement. Perdant peu à peu son statut d'atelier du monde, la Chine devient aujourd'hui beaucoup plus offensive à l'extérieur, investissant dans tous les domaines, partout dans le monde. Son besoin majeur en matières premières explique sa très grande présence en Afrique ; présence qui pose quelques interrogations pour les entreprises françaises installées sur le continent. Chacun en est convaincu, l'Afrique est le grand marché de demain. Il faut maintenant arriver à structurer nos implantations, en particulier en matière de formations, par l'ouverture d'antennes de nos écoles, afin de consolider nos relations avec les pays africains.
Sur la Russie, l'activité économique est au point mort actuellement. Certaines entreprises ont rapatrié leurs activités, d'autres les réduisent en attendant des temps meilleurs. Évidemment les sanctions économiques jouent, mais la baisse des prix des hydrocarbures impacte fortement l'activité aussi. Malgré cela, les structures russes sont fortes et les grands groupes français restent implantés sur place. C'est l'investissement qui reste figé, mais il devrait repartir.
Sur l'Iran, il y a deux sujets majeurs : la formation et l'accompagnement des entreprises. Sur la formation, deux missions ont déjà été organisées et se sont révélées satisfaisantes. Sur l'accompagnement, le problème de financement demeure. Les grandes banques françaises restent réticentes. Elles ne veulent pas se mettre en difficultés auprès des autorités américaines, qui ont une conception très large de l'utilisation du dollar. Des verrous subsistent encore. Il faut donc passer par des entreprises qui n'ont aucune implantation aux États-Unis.
EN CHIFFRES
La Seine-et-Marne, un département dynamique (dernier trimestre 2016)
3 490 emplois créés, soit la croissance la plus soutenue de la région (+1,1 %)
11 328 entreprises créées en 2016, soit +7 % par rapport à 2015
7,9 % de chômage, soit 0,7 point de moins que le taux régional
- 3,9 % de défaillances d'entreprises par rapport à 2015